Discours de Yves Goasdoue, Président du CNSR à l’occasion du nouveau CNSR du 23 janvier 2017

Yves GOASDOUE - Président du CNSR

 

Monsieur le Ministre, Monsieur le Préfet, Monsieur le délégué interministériel, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil national de la sécurité routière, Mesdames et Messieurs. En accédant à la présidence du Conseil national, je mesure l’ampleur de l’attente du gouvernement. Elle vient d’être dite, ainsi que celle des pouvoirs publics de manière plus générale. Je mesure tout autant l’attente des familles qui ont perdu un être cher ou qui restent meurtries à jamais.

Ce qu’ont dit le Ministre et le délégué interministériel se passe de tout commentaire : 3 469 morts. Les maires de France, dont je suis, savent très bien ce qu’il en est lorsqu’il faut annoncer aux proches et aux familles la terrible nouvelle. Nos compatriotes attendent de nous que nous fassions de bonnes recommandations, de bonnes propositions. Ils attendent de nous de la responsabilité, de la détermination pour défendre la grande cause nationale qui fonde l’existence même de notre instance. C’est avec une grande fierté, réellement, que je vais présider tout à l’heure cette première séance plénière du nouveau CNSR qui débute sa quatrième mandature.

Je veux, à cette occasion, comme vous l’avez fait Monsieur le Ministre, saluer mon prédécesseur Armand Jung pour le remercier de son travail. Je l’ai joint au téléphone. Il salue celles et ceux qu’il a eu à côtoyer pendant sa présidence. Je ne suis pas, Mesdames et Messieurs, au sens strict un spécialiste de la sécurité routière, sinon vous le sauriez, et je n’ai pas l’intention de feindre de l’être. Mon ambition est d’être un président qui coordonne, qui impulse, qui libère les énergies, qui crée des synergies, qui crée le réseau dont vous parliez, Monsieur le délégué interministériel. C’est un engagement exaltant, parce qu’on se situe en amont des politiques publiques. A cet égard, nous avons une obligation, celle de l’inventivité sur le moyen et le long terme. En réalité, nous avons l’obligation d’instaurer entre nous une réflexion constructive pour dégager des pistes d’actions pragmatiques, efficaces, rapides, pour faire les bonnes recommandations au gouvernement.

Je suis extrêmement honoré, je vous le dis en toute sincérité, de présider ce conseil, qui réunit des personnalités de haut niveau au plan national et international, des spécialistes et des passionnés engagés dans le large spectre de la sécurité routière. Je souhaite que le Conseil demeure une instance dans laquelle on peut débattre et s’exprimer, avec pour seul objectif, évidemment, de progresser et en toutes circonstances, de garder le cap de notre mission. Faire les bonnes recommandations, faire les bonnes analyses. En réalité, il s’agit d’être au service de la nation.

Pour toutes ces raisons, je renouvelle à Monsieur Bernard Cazeneuve, alors Ministre de l’Intérieur, toute ma gratitude pour m’avoir proposé de présider le Conseil. Je vous remercie, Monsieur le Ministre de l’Intérieur, des mots aimables que vous avez eus à mon endroit. Ils sont sans doute trop forts, mais ils font toujours plaisir à entendre. Je retiens de vos propos, Monsieur le Ministre, quelques lignes fortes. Une compétence plus affirmée pour le Conseil national. Nos recommandations devront être innovantes. Je souhaite qu’elles le soient. Elles devront aussi prendre – c’est ça la difficulté – en considération les impacts technologiques, financiers et sociétaux qu’elles sont susceptibles de produire. Sinon, en réalité, elles ne produisent pas. C’est l’efficacité, la vie épargnée, qui constituent notre but et notre raison d’être et en aucun cas l’effet d’annonce. Dans cette perspective et dans le souci de conforter la pertinence de nos propositions sur des bases objectives en lien avec le fondement des connaissances, je compte sur l’appui scientifique et technique du comité des experts qui, je crois, Monsieur le délégué interministériel, sera opérationnel dès début février. Ce comité de quinze membres reconnus par leurs pairs pour les travaux qu’ils ont conduits a été constitué sur la base d’un appel public à candidatures, ce qui est un gage d’indépendance, puisque nous avons agi comme en matière de santé, d’environnement ou de sécurité alimentaire.

Un CNSR aux compétences plus affirmées, mais aussi un Conseil désormais seul responsable des recommandations qu’il formule. Le Conseil a toute latitude, dans les limites que je viens d’exposer, pour formuler ses recommandations, mais celles-ci n’engagent que ses représentants issus de la société civile, puisque les représentants de l’Etat qui siègent au CNSR ne prendront plus part au vote. Ainsi, le partage des rôles est désormais plus clair. Le Conseil conseille et le gouvernement décide sans être tenu par le contenu des recommandations. Mais, Monsieur le Ministre, je sais que vous serez attentif. Vous l’avez dit, Monsieur le Ministre, la quasi-totalité des recommandations ont été suivies d’effet et de mise en œuvre. Vous en avez cité quelques-unes parmi les plus emblématiques. Je souhaite que les recommandations que nous serons amenés à fournir dans les prochains mois connaissent le même sort.

J’en viens maintenant très rapidement, parce que je le ferai tout à l’heure, au fond du sujet, qui est l’organisation de nos travaux telle que j’en perçois l’approche. L’exposé que vient de faire le délégué interministériel est extrêmement démonstratif. La mise en perspective des tendances constatées en matière de sécurité routière nous éclaire sur les enjeux auxquels notre société est confrontée, qu’il s’agisse de l’apport des nouvelles technologies et du numérique qui irriguent toujours plus les véhicules de toute sorte, ou du développement des modes de déplacements doux et alternatifs, par nature plus vulnérables, ou encore du comportement et de l’état de santé de nos concitoyens à chaque étape de la vie, voire les déplacements à caractère professionnel. Les attentes sont fortes. Fort de l’expérience des précédents Conseils, je souhaite que nous structurions nos travaux et notre organisation future autour de quatre commissions thématiques, qui devront conduire, au fond, les réflexions devant déboucher sur des recommandations structurées et argumentées.

Pourquoi quatre commissions ? Vous avez eu l’amabilité de le dire, Monsieur le Ministre, je suis un élu local un peu expérimenté et je sais que lorsque l’on multiplie les commissions, on noie l’énergie. Il n’est pas question de noyer l’énergie. Je pense que nous avons de belles choses à faire et à faire rapidement. Je les nomme simplement. J’en détaillerai le contenu pour en discuter avec vous, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil et le cas échéant, amender les choses.

Une première commission sur les usagers vulnérables, qui engloberait le traitement des risques auxquels sont exposés les piétons, les cyclistes, les usagers d’engins de déplacement personnel – il y en avait un dans la salle tout à l’heure – et les conducteurs de deux-roues motorisés. Une seconde commission sur l’éducation et le risque routier professionnel, qui couvrirait d’une certaine manière le continuum éducatif ciblé sur les jeunes, la formation initiale, la formation continue et toutes les formes d’actions et de prévention dans le monde professionnel. Vous l’avez évoqué tout à l’heure, Monsieur le Ministre.

Puis, les véhicules, la technologie innovante et les infrastructures. Je passe rapidement, parce que je serai un peu plus long tout à l’heure. Enfin, une quatrième commission sur la conduite et l’état de santé ouvrirait naturellement le champ des addictions, alcool et stupéfiants, les troubles de la vigilance et le vieillissement de la population. Telles sont les propositions qui me paraissent les plus efficaces, mais nous en discuterons tout à l’heure.

Mesdames et Messieurs, nous avons un travail passionnant à accomplir. Ce travail nous oblige à l’excellence vis-à-vis du gouvernement, dont nous sommes le conseil, mais aussi vis-à-vis des Français. Je sais que nombre de sujets – vous l’avez dit en creux, Monsieur le Ministre – sont quelques fois conflictuels, controversés, parfois polémiques. Je n’ai pas l’intention de les éluder, mais je le ferai dans le respect et l’écoute de chacune et chacun, avec un seul cap : produire le meilleur conseil, celui qui peut être mis en œuvre rapidement, celui qui sauve des vies. Nous allons pouvoir échanger, tout à l’heure, après que nous aurons accompagné Monsieur le Ministre pour que la presse lui pose des questions, dans la seconde partie de notre réunion. Je vous proposerai les prochaines étapes de structuration du Conseil national, afin que chacun trouve la place qui lui revient et l’accueil qui lui est dû. Je vous remercie très vivement de votre attention.